28.2.18

Fin



 Prokheiron a vécu de la fin novembre 2016 à la mi-février 2017. Mauvaise herbes qui prendra le relais de Prokheiron, en février 2017, vivra jusqu'à la mi-août de la même année. Ensuite, Sans ciel ni soleil survivra chichement de la seconde moitié d'août jusqu'au tout début décembre 2017, date qui correspond à la naissance de Jonctions. Quatre blogs pour contenir les repères, les jalons d'un cheminement déployé à différentes cadences sur une période d'un peu plus d'un an. Jonctions trouve aujourd'hui sa fin, alors que le mois de février 2018 s'achève. Saki et toi, vous en avez paisiblement discuté, et, vous êtes rapidement tombés d'accord : cette nuit glaciale est une très belle nuit, la meilleure pour s'en aller vers un lointain ailleurs sans laisser la moindre trace derrière vous, puisque le dégel et la pluie effaceront sous peu vos empreintes de pas inscrites parallèlement sur la neige. Saki, tout comme toi, ne craint pas le froid et vous aimez marcher. Tous deux, vous savez que les jours heureux, finalement, ne sont pas si loin, mais qu'il vous faut encore vous déplacer pour vivre dans un autre univers qui répondra peut-être mieux à vos humbles attentes faites d'un profond désir pour une existence sereine. See U...

Blank day







— C'est quoi ce bordel ?!?

- 3°C

26.2.18

Voisins

 Profession : dévoisinateur qui prend son métier à cœur.

The letter



 — Une lettre à l'intention de K., n'est-ce pas ? Tu lui parles de hula hoop, du triangle isocèle et des parallèles, de la terreur que t'inspirent les amandiers en fleurs, du cimetière marin où, sous le bleu du ciel, reposent les ossements de Valéry, de ta volonté de retrait loin du monde tel un anachorète sans foi, du wabi sabi et de l'entrave aux gestes que représente le port d'un kimono, des spaghetti trop cuits, de ton amour quasi christique pour tes congénères — tes voisins en particulier —, des dernières tendances de la mode inuit qui emprunte aux touaregs, de l'élision du "e" dans le corps d'un vers, de la variante du pion empoisonné utilisé par Robert James Fischer, dit Bobby Fischer, etc.. Tu ne crains pas que K. ne finisse par se fatiguer de te lire, hein ? Tu veux qu'elle te laisse tomber, c'est ça ?

I Don't Wanna Be Funny Anymore


I don't want the joke to be on me.
Yeah, I'll buy the clothes and I'll be the best dressed.
Yeah, I'll read the books and I'll be the smartest.
I'll play guitar and I'll be the artist.

25.2.18

Impossible

   Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait.

Mark Twain, Les Aventures de Huckleberry Finn  

Vacances



 Tu as appris hier que les vacances scolaires venaient de débuter. Les vacances sont les périodes que tu préfères étant donné que la pression démographique urbaine diminue nettement. Montmerdier devient alors, pour toi, un peu plus fréquentable. D'autant plus fréquentable quand, au cours de ces vacances, se profile un dimanche, comme aujourd'hui. Ainsi, tu n'hésites pas à sortir de ton antre pour arpenter le quartier. Par moment, lorsque la circulation se tarit complètement, que, dans un même temps, tu ne distingues aux alentours ni cyclistes, ni piétons, aucune âme qui braille comme à l’accoutumée, tu en arrives à imaginer, non sans une certaine allégresse, que l'humanité a été décimée — peu importe comment. Tu rêves que tu es l'un des derniers représentants de cette espèce désastreuse et que le monde vous — Saki & toi — appartient. Tu ne sais pas, à l'heure où tu écris, à quelle date prendront fin ces merveilleuses vacances. Intérieurement, tu souhaites ardemment qu'elles durent pour l’Éternité. Toute l’Éternité.

23.2.18

Regard

Ne regarde ni en avant ni en arrière, regarde en toi-même, sans peur ni regret. Nul ne descend en soi tant qu'il demeure esclave du passé ou de l'avenir.
Emil Cioran, De l'inconvénient d'être né   

21.2.18

Pourquoi ?

 Pourquoi faire aujourd'hui ce que tu peux remettre au lendemain !?!

La haine

 Tu t'es réconcilié avec l'humanité en lisant Cioran tout au long de la matinée. Dans l'un des passages compulsés, l'image venue d'un bal évoqué par Cioran t'as largement fait sourire et te feras encore sourire pendant pas mal de temps : « La haine qu’on lit dans les yeux des jeunes filles que personne ne fait danser m’inspire plus de terreur que les salles d’opération ».

20.2.18

Morigenatus

 Tu n'es pas un être instruit aux bonnes mœurs, bien morigéné. Aussi, ta fiancée n'hésite pas à souvent te réprimander, mais tu ne te corriges pas pour autant.
Morigenatus a pris le sens de « rendu docile, éduqué » sous l'influence de morigerus « complaisant, docile, soumis ».
 Tu ne respectes pas l'étiquette chaque fois que cela te semble inutile, sachant qu'on obtient plus de choses et plus rapidement en montrant les dents, tout en souriant, qu'en étant seulement poli ou affable, comme le voudrait la bonne société. Tu considères, la plupart du temps, la politesse sous l'angle de l'hypocrisie, soit une façon de se dissimuler derrière un masque. Pour toi, la franchise est une vertu qui peut se passer de colifichets verbeux et se montrer nue.
 Qu'on ne te demande pas ce qui t'a amené à écrire ce qui précède, car, toi-même, tu n'en sais rien. Une idée qui t'a traversé, un instant, et sur laquelle tu viens d'appuyer ce billet.

Ténèbres

Quelque chose me serait destiné dans ce vacarme infernal, est-ce possible ?
Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres   

Cadence

 Vous — Saki et toi, tout le monde — en êtes au 51e jour de l'année, alors que Jonctions ne compte que 42 billets ou posts, selon l'anglicisme en vogue. Ce qui fait que le rythme moyen de publication reste inférieur à un billet ou post par jour. Dans cet univers civilisationnel où la performance prime, tu te sens un peu à la ramasse ; tu as l'impression de porter le poids d'un handicap. Tu imagines que tes lecteurs se plaignent intérieurement, sans l'exprimer explicitement, de ne pas être suffisamment abreuvés de ta prose, certes délicieuse, mais relativement maigre, et qu'ils t'accusent d'être d'une sobriété quelque peu lacédémonienne. Tu mets en avant, pour te dédouaner, le climat actuel, la période qui pousse à la réduction de l'activité en raison des contraintes liées à l'hibernation, mais tu sais que ce n'est pas là la meilleure des excuses. Tu penses que le seul moyen d'augmenter la cadence des publications, c'est de rédiger des inepties comme celles que tu t'appliques à écrire en ce moment.

19.2.18

Palétuvier

 Le #205 s'assombrit, t'obligeant à allumer la petite lampe de bureau posée à la gauche du PC afin de mieux distinguer les touches du clavier et réduire ainsi les erreurs de frappe toujours aussi nombreuses bien que tu utilises des claviers AZERTY depuis la nuit des temps. Tu ne seras jamais le Glen Gould du PC. Il faut te faire à cette idée. Les trois phrases précédentes t'ont déjà demandé de multiples reprises. Aussi, les mots ne cessent d'être soulignés de rouge par le correcteur automatique. C'est regrettable, car, avec une bien meilleure dextérité, tu disposerais de beaucoup plus de temps pour écrire des billets et la frappe se ferait alors moins décourageante. Tu pourrais, avec des doigts plus agiles, une frappe plus précise, te noyer dans une sorte de logorrhée textuelle qui ferait de tes discours un véritable tsunami. Immense déferlante qui te soulèverait de la brune mangrove, dans laquelle tu patauges tristement, vers les terres intérieures verdoyantes et fraîches où tu n'as jamais mis les pieds, profondément enraciné par ta maladresse, lourd palétuvier sans âge que tu es.

Horizon

 Tu viens de remarquer que tu avais ouvert Horizon un premier février 2009, en ne l'alimentant réellement que dans les trois derniers jours du mois. Ce blog aura dessiné, pendant presque sept ans, jusqu'à la fin de l'année 2015, les rives du fleuve entre lesquelles s'est écoulée ton existence — ta vie aurait dit Goethe. Neuf ans plus tard, tu te félicites d'avoir tenu ce blog à jour avec relativement peu d'interruptions dans le temps. Aujourd'hui, immuables, sur les rives sont plantés des textes, des citations, des photographies, des morceaux de musique : autant de jalons qui te permettent de te référer facilement à ton passé. Ces références éclairent, avec plus ou moins d'intensité, le présent actuel et donnent, en quelque sorte, un sens un peu plus lisible lorsque tu te penches sur la vie que tu mènes avec Saki actuellement. Horizon est devenu ainsi un objet virtuel précieux.

17.2.18

La valeur des choses

 La valeur des choses n’est pas dans la durée, mais dans l’intensité où elles arrivent.
 C’est pour cela qu’il existe des moments inoubliables, des choses inexplicables et des personnes incomparables.
Fernando Pessoa    

15.2.18

Crépuscule



 Bonnes ou mauvaises, les journées, comme les semaines, les mois, les années, les siècles, ont leur fin. Cette limite entre le jour et la nuit est souvent vite atteinte. Aujourd'hui, tu n'auras pas eu le temps d'entreprendre la réalisation d'un dessein ébauché au matin ; tu dois déjà la remettre au lendemain. Ou, peut-être même, il te faudra désormais ne plus y penser, car ce jour, qui t'avait semblé si opportun pour déployer ton action, est sur le point de s'achever. Aussi, tu ne disposes plus d'une durée suffisante pour faire ce qu'il t'avait semblé bon de faire dès le réveil. Tu as maintenant l'impression d'avoir perdu ton temps sans vraiment saisir comment tu t'y es pris pour laisser filer les heures si rapidement. Mais, bon... Ce n'est ni la première ni la dernière fois que les choses se déroulent ainsi et ça ne gâchera certainement pas la nuit qui suit et qui sera probablement plus féconde en t'incitant à écrire sur cette journée passée, sans finalement savoir si elle aura été bonne ou mauvaise. Une journée comme une autre.

14.2.18

One Last Time



     Alone alone again on valentine...

12.2.18

Sans destination

— Un texte prendra bientôt sa place sous cette photographie —

13.02.2018 06:13:39 PM
 Après avoir publié la photographie ci-dessus, faite dimanche dernier à quelques pas de chez toi, tu étais persuadé que cette image deviendrait une source d'inspiration pour un texte qui s’inscrirait, plus ou moins rapidement, à sa suite. D'où la courte annonce en guise de légende. Tu dois, ce soir, te résigner à penser que tu t'étais un peu trop facilement avancé. Car, à l'évidence, cette photographie n'a pas engendré le judicieux commentaire que tu envisageais alors de produire. Tu aimes toujours autant cette image, mais elle te laisse pourtant en panne d'inspiration. C'est ainsi, c'est la vie…

10.2.18

I'll Take Care of You


7.2.18

Les mots

J'emploie les mots que tu m'as appris. S'ils ne veulent plus rien dire apprends-m'en d'autres. Ou laisse-moi me taire.
Samuel Beckett, Fin de partie, 1957   

6.2.18

Conclusion

 Après avoir publié, tu as longuement discuté d'Apocalypse avec Saki. Il s'est montré très attentif à ton discours, a examiné soigneusement tes arguments et, finalement, s'est dit sensible à ton désenchantement, triste désillusion résultant du constat établi sur l'état du monde actuel. Il n'est pas plus optimiste que tu ne peux l'être quant à l'avenir de la planète sur laquelle, lui et toi, vous faites de votre mieux pour survivre avant de vous effacer définitivement, sans laisser de traces, de la surface de cette sphère perdue dans l'Univers qui, en d'autres temps, était certainement bien plus accueillante. Saki en est arrivé à une conclusion visant à te faire remarquer que tu n'avais pas à trop focaliser tes pensées sur l'avenir de ce monde, puisque tes réflexions ne changeraient en rien le cours de l'Histoire, et, qu'en réalité, l'Histoire ne se construisait que dans ta propre tête. « Une tête humaine est mal faite », a dit Saki. « Voilà pourquoi nous en sommes à vivre l'anthropocène », a-t-il poursuivi. « Aussi, cesse de te servir de ta tête si mal faite et tout ira beaucoup mieux ! », a dit Saki. Tu n'as plus qu'à suivre le conseil lumineux de Saki.
Fin de l'Histoire.

Apocalypse

 La nuit n'est plus très loin. Ce mardi tire sur sa fin dans une atmosphère presque identique à celle d'hier : un ciel aussi pluvieux et des températures aussi basses. Malgré ça, sous les fenêtres, dans le parc, les amandiers ont fleuri. Les pigeons survivent. Saki et toi, vous aussi, vous survivez. Vous avez encore abaissé le niveau de vos passions. Saki a rallongé ses siestes. Tu n'as pas fait grand chose, sinon coder au format HTML et mettre en ligne "La nef des fous", un texte de Theodore Kaczynski, aka Unabomber, qui t'es tombé sous les yeux, ce matin. Tu n'es pas entré de manière solitaire, comme T. K., dans l'activisme violent pour tenter de dévier, un tant soit peu, la trajectoire prise par cette civilisation maudite. Tu avais alors d'autres choses à faire. Mais tu comprends parfaitement les motifs et les actes qui ont conduit Unabomber à passer le restant de sa vie en prison. De toute façon, c'est, pour Kaczynski, la prison incluse dans une vaste prison où ceux qui s'estiment en libertés sont, en réalité, incarcérés mentalement, symboliquement par cette civilisation à la con, dirigée par des cons qui manipulent et font voter des cons sous couvert de démocratie. Contre ça, ni Unabomber, ni Saki, ni toi, vous n'y pouvez rien, sinon refuser de participer autant que possible à ce putain de bordel qui, inéluctablement, finira par une véritable et incommensurable catastrophe. Ni Theodore Kaczynski, ni Saki, ni toi, vous n’assisterez à l'Apocalypse. C'est dommage… Tu aurais bien aimé contempler ça, aimé observer, à ce moment là, la tête que ferons tous ces cons, chantres du progrès et de la technologie. Il te faudra pourtant te contenter de ton imagination seulement, comme tu l'as fait en lisant récemment "La Route" de Cormac McCarthy.
There’s not a lot of good news on the road. In times like these.
Cormac McCarthy, The Road     

5.2.18

Missing

 La pluie est venue hier dans la nuit. Il a plu, presque sans discontinuer, toute la journée. Il fait froid. Pour s'abriter du mieux possible, les pigeons se sont rassemblés, serrés en couple, contre les portes fenêtres du #205. Après leurs avoir causé quelques frayeurs en se jetant contre les vitres, Saki a finalement décidé de les laisser se réchauffer tranquillement. Les pigeons passeront ainsi cette froide et seconde nuit ruisselante en paix. Tu t'es félicité pour avoir stocké suffisamment de victuailles et de cigarettes, samedi, afin de ne pas être obligé de braver les intempéries en ce début de semaine. Tu a pris tout le temps nécessaire pour vaquer aux détestables mais incontournables tâches ménagères, telles que nettoyer la vaisselle, changer la litière de Saki, donner un coup de balai, etc.. Tu as aussi préparé de quoi te restaurer pour les quatre ou cinq jours à venir. Tu n'auras plus qu'à réchauffer tes prochains repas. Saki, lui, mange tous ses repas froids, même en hiver. Vous avez plusieurs fois joué ensemble quand Saki a senti l'envie de se dégourdir les pattes, à la suite de ses multiples siestes. Le reste du temps, tu as lu quelques pages de Pessoa, d'autres de Pamuk, tu as classé et sauvegardé des textes et des images sur ton PC, mais tu n'as rien produit de particulier, sinon en photoshopant une vieille photographie aux couleurs orageuses de fin d'été, histoire de propager un rayon de lumière dans ta tête.



 Tu as encore écouté de nouvelles musiques sur Bandcamp. Et, acte maintenant plutôt rare, tu as rapidement survolé quelques blogs d'individus, plus ou moins connus de toi, qui prétendent écrire — mais pas comme toi, c'est sûr ! En fin d'après-midi, tu as passé un moment à parler au téléphone avec BBL. Et puis, ce soir, tu as ouvert un grand cahier noir, vierge de toute écriture en dehors de trois premières pages magnifiquement remplies par la main de ta fiancée. Sur la page d'après, tu as inscrit, au stylo à encre, une encre très noire, les initiales — accolées d'un point — du prénom et du nom de ta fiancée, puis tu as soigneusement calligraphié deux petits points, l'un au-dessus de l'autre, et, enfin, tu as lentement écrit les deux mots suivants : « Portée disparue ». Tu as refermé le cahier. Tu ne l'as pas rangé. Tu l'as laissé sur le bureau noir, le plus large des trois bureaux à ta disposition. Saki est alors venu se coucher sur la couverture cartonnée du grand cahier. Tu t'es ensuite calé dans un siège, face au bureau blanc. Tu as rallumé le PC. Tu as raconté votre journée, celle de Saki et la tienne. Tu finis de boire un café déjà presque froid et tu fumes une énième Winston. Voilà, ce sera tout pour le moment. Tu penses, sur l'instant, n'avoir rien de plus à dire.

La lune

Il est humain de vouloir ce qui nous est nécessaire, et il est humain aussi de désirer, non ce qui est nécessaire, mais ce que nous trouvons désirable. Ce qui est maladif, c'est de désirer avec la même intensité le nécessaire et le désirable, et de souffrir de notre manque de perfection, comme on souffrirait du manque de pain. Le mal romantique le voilà : c'est vouloir la lune comme s'il existait un moyen de l'obtenir.
Fernando Pessoa, Le Livre de l'intranquillité, 53 L.I., p. 86  

4.2.18

Feel The Same

Sans titre



 Le week-end est fini. Demain, les malheureux travailleurs reprendront le collier. Pas toi ! Tu ne travailles pas, tu n'aimes pas ça. Saki non plus, d'ailleurs. Hier, tu as consulté le bulletin météorologique pour la semaine à venir. Sachant que du mauvais temps est annoncé, tu es allé te ravitailler, prévoyant suffisamment de petits pâtés pour Saki et suffisamment de cigarettes pour toi, afin de t'éviter d'avoir à sortir sous la pluie au cours des prochains jours. Depuis, tu vis en paix. Tu as bien avancé la lecture de « Cette chose étrange en moi », le dernier roman d'Orhan Pamuk dont tu as lu, il y pas mal de temps déjà, d'autres récits que tu avais beaucoup aimés, tout autant que ce roman-là. Tu vis donc en paix et en autarcie. Tu conserves pourtant le souvenir de ta fiancée qui, en fin de semaine, a soudainement disparu de ton univers. Tu y penses encore. Aussi, pour ne pas tomber dans le spleen, tu ne te contentes pas de lire ou d'écrire : tu dessines, tu peins. Tu ne dessines, ne peins pas comme l'entendent la plupart des gens, puisque tu utilises des logiciels spécialement conçus pour ce type d'activités. Tu tues paisiblement le temps en attendant des nouvelles de ta fiancée. Tu sais que, tôt ou tard, elle sera amenée à lire ce qui précède, à regarder tes oeuvres. Ce que tu ne sais pas, c'est comment elle réagira. Peut-être qu'elle ne réagira pas, ce qui sera, de toute façon, une indication sur la direction que suivra ta destinée. Destinée qu'en aucun cas tu ne cherches à maîtriser — tout comme ta fiancée, ou plutôt, ton ex-fiancée. Tu te laisses porter pas le fleuve de ton existence — ta vie, aurais dit Goethe — qui n'est plus très loin de son embouchure. Tu n'imagines pas une seconde le remonter à la nage. Tu as passé l'âge pour te faire une idée pareille. Tu n'as aucune envie de te noyer dans une telle entreprise. Serein, tu te laisses porter. Tu te contentes de publier ta dernière oeuvre picturale — sans titre —, inspirée des toiles de Jackson Pollock, et tu siffles Saki pour le convier à partager le dernier sandwich du week-end. End.

Amour

Il y a des gens qui n’auraient jamais été amoureux s’ils n’avaient jamais entendu parler de l’amour.
La Rochefoucauld   

2.2.18

Tea For Two


Minable

Le redoutable retour du refoulé roule ivre-mort sous la table. Minable.

Décision

Make Me Fade

Disparaître

Commencer à disparaître du souvenir. Enfin libérés, nous pouvons être démiurges (j'ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels), ou bien, par l'abandon de toute conscience séparée, nous entrons enfin dans le total oubli, qui seul nous restitue à l'être.
Albert Béguin, Âme romantique, 1939   

Oubli

 Le soleil vient de se coucher et tu te demandes, maintenant, ce que tu vas faire de Jonctions. Tu ne sais pas encore si tu continues à l'alimenter ou si tu le laisses à l'abandon, comme tu as laissé, auparavant, un tas d'autres blogs dans le fossé, sur le bas-côté de la route. Tu peux encore te donner le temps d'y repenser. Rien ne presse. Ce qui te pousse à y réfléchir, en ce début de soirée, c'est l'envie de te faire oublier. Dans cette perspective, ce n'est pas seulement Jonctions que tu devras délaisser, mais toute activité en ligne sur les sites où tu as laissé des traces de ton passage ces deux dernières années. Ce qui va des Tumblr à Ello en passant par Twitter ou Pinterest. C'est parfaitement faisable. Les corbeaux, qui, en ce moment même, survolent le parc en tournoyant et que tu suis des yeux tout en écrivant, te donneront peut-être la meilleure indication vers la voie que tu devras prendre, désormais. Saki, lui, ne veut pas se prononcer et refuse ainsi d'influencer ta décision. ¡Ya veremos!

Fin

Le présent est la seule chose qui n'a pas de fin.
Erwin Schrödinger   

Dangers

 Février, le mois de tous les dangers. K. t'as aimablement fait remarquer, via conversation téléphonique, que tu avais titré "Challenge" avec un seul "l". Comme quoi tu n'es pas coutumier de cet exécrable  vocable bon pour les adeptes du coaching. Tu viens de corriger l'erreur. Plus bas, tu as corrigé dans la foulée un "février" — là aussi signalé par K. — auquel il manquait un "r". Que ferais-tu sans K. ? C'est la question que tu poses à Saki. Mais, Saki est bien trop intelligent pour avancer le moindre élément de réponse concernant un genre d'affaire hautement inflammable. Plutôt que de répondre, Saki t'ignore et préfère alors se consacrer à sa toilette. Tu te dis qu'il est temps de couper ton PC. La nuit te portera conseil. Tu ne t'en fais pas plus que ça, puisque, par ailleurs, Rob t'annonce un bel avenir :
[...] Tes astres me donnent quelques raisons de penser que tu es actuellement en très bonne posture pour créer des innovations extrêmement prometteuses, Capricorne. Écoute tes bonnes intuitions et ne laisse passer aucune occasion de te bâtir une coquette fortune.
 Aucun challenge à relever dans une telle et belle prédiction. Tu devras juste à te laisser porter pas ton destin, celui que dessinent si bien pour toi les astres imperturbables qui se tiennent très haut dans le firmament étoilé, loin des cervelles dépravées des coaches désastreux, experts en challenges qui ne conduisent qu'à des catastrophes ineffables, mais pourtant bien visibles.

1.2.18

Look Around

Regard


Regarder

 Le long de la ligne qu’écrit le verbe regarder, ce n’est pas le même monde qui vient selon que la ligne passe par le lynx, l’épervier, le bœuf, la chauve-souris, l’antilope, le serpent ou l’homme, exactement d’ailleurs comme ce n’est pas déjà tout à fait le même d’un homme à un autre.
Jean-Christophe Bailly, Les animaux sont des maîtres silencieux, 2010

Challenge

 Tu viens de relire le billet précédent et tu sais que Saki a indubitablement raison. Pourtant l'idée de passer aux yeux des imbéciles pour le Roi des bloggers, sachant qu'ils vont se tordre les doigts de jalousie, hante encore ton esprit. Tu n'as que faire du regard des imbéciles, et, pourtant, tu ne résistes pas toujours à l'envie de les faire baver, au plaisir d'enfoncer un peu plus profondément leur tête mal faite dans la poubelle d'où elle n'aurait jamais dû dépasser. Mais, bon, tu laisses tomber. Tu renonces d'autant plus facilement que l'idée, visant à publier en un mois — 28 jours — une centaine de billets, ne te semble pas si ardue à réaliser, pourvu que tu complaises dans la même ligne éditoriale qu'en ce moment : écrire pour ne rien dire. « Saki, cesse de rigoler, s'il te plaît ! »

Février

 Au cours du mois de février 2017, tu as publié, successivement sur Prokheiron, puis sur Mauvaises herbes, 95 billets, au total. Tu viens de le remarquer. Tu as des difficultés à te souvenir précisément de l'état d'esprit dans lequel tu pouvais te tenir à l'époque, il y a maintenant un an. Tu as oublié le motif qui t'avais poussé à être si prolifique. Tu souris intérieurement en pensant à dépasser, sur Jonctions, en ce mois de février 2018, le nombre de billets publiés en février dernier. Saki, à qui tu viens d'en parler, mal réveillé, te conseille de ne pas trop y croire. Saki considère tout ce qui touche au "dépassement de soi" comme une stupidité inscrite dans l'air du temps. Tu sais qu'il a parfaitement raison. Tu n'y penses plus.

Les imbéciles

 En ce début de IIIe millénaire, en ce triste et bas monde, même les imbéciles — Zeus sait combien ils pullulent, copulent et prolifèrent — ne sont pas heureux. Maudite civilisation !

29.1.18

Ancienne route



 Finalement, trois jours après, Saki et toi, vous n'avez pas donné réalité à l'envie — surtout pour toi — de prendre la route ensemble. Vous vous êtes contentés de visionner d'antiques images faites avant même que Saki ne vienne au monde. Saki, qui n'a jamais vraiment voyagé, t'as posé un tas de questions sur le plaisir qu'il pouvait y avoir à rouler sans but, vers l’inconnu. Tu lui as répondu, qu'un jour ou l'autre, tu lui permettras de découvrir, par lui-même, cette sensation. Saki est un animal patient. Toi aussi. Il y a un bon jour pour tout.

Mes pensées

 Hélas, quelles drôles de choses vous êtes mes pensées écrites et peintes ! Il y a peu, vous étiez encore si multicolores, jeunes et malignes, pleines de piquants et d’épices secrètes que vous me faisiez éternuer et rire, et maintenant ? Déjà vous vous êtes dépouillées de votre nouveauté, et quelques-unes d’entre vous sont, j’en ai peur, sur le point de se transformer en vérités : elles ont déjà l’air si immortelle, si désespérément comme il faut, si ennuyeuses ! Et en fut-il jamais autrement ? Quel genre de choses écrivons-nous et dépeignons-nous donc, nous, mandarins aux pinceaux chinois, nous éterniseurs de choses qui peuvent s’écrire, quelles sont les choses que nous soyons capables de dépeindre ? Hélas, jamais rien d’autre que ce qui est sur le point de se faner et commence à perdre son parfum ! Hélas, jamais rien d’autre que des orages qui se retirent, épuisés, et des sentiments jaunis et tardifs ! Hélas, jamais rien d’autre que des oiseaux las de voler qui se sont égarés et que la main — notre main — peut désormais saisir au vol ! Nous éternisons ce qui n’en a plus pour longtemps à vivre et à voler, rien que des choses fatiguées et plus que mûres ! Et c’est seulement pour votre après-midi, mes pensées écrites et peintres, que j’ai des coloris, bien des coloris peut-être, bien des tendresses multicolores et cinquante jaunes, bruns, verts et rouges : mais à les voir, nul ne devinera ce qu’était votre aspect à votre matin, vous, les étincelles et prodiges soudains de ma solitude, vous, mes chères mes mauvaises pensées !
Friedrich Nietzsche, Par-delà bien et mal   

26.1.18

La route



 Certains jours, tu imagines reprendre la route en direction de l'Ouest et descendre ensuite vers le Sud. Tu vois, dans ton rêve éveillé, Saki paisiblement endormi sur le siège-passager. Vous ne savaient pas combien de temps vous allez rouler. Vous ne savez même pas si ce voyage vous ramènera vers le lieu d'où vous êtes partis — La Zone. Tu préfères penser que ce départ est sans retour. Saki n'a pas d'avis sur cette éventualité. Pourvu qu'il soit avec toi. Pourvu que, Saki et toi, vous preniez la route ensemble. Ensemble pour l'éternité.

Love Came Here

25.1.18

Spectator

 Spectator turned 9 today!

ALT+CTRL



 Tu as mis Jonctions en fonction le 30 novembre de l'année dernière et, le 2 décembre suivant, tu racontais ce qui t'avais amené à ouvrir un blog sur lequel tu pensais alors ne publier aucune image. Un peu plus d'un mois plus tard, tu avais enfin réussi à remettre de l'ordre dans le PC. Depuis quelques jours, après avoir ré-installé Photoshop, tu recommences à post-produire des photographies et tu t'es même amusé à dessiner quelques planches digitalisées. Mais, là encore, comme souvent au cours des 20 années passées, tu estimes que tu restes assis bien trop de temps face à l'écran. Tu te demandes si le moment de prendre de réelles vacances n'est pas sur le point d'advenir. Cela ne tient qu'à toi, car rien ni personne ne t'obligent à pianoter sur un clavier tout en t'usant les yeux inutilement. Tu publies, cette nuit, la première image sur Jonctions et tu te donneras alors le temps d'y réfléchir. Laisser de côté pendant quelques jours cette machine est, pour Saki à qui je viens d'en parler, une excellente idée... Pourquoi pas ?

24.1.18

The Universe Smiles Upon You

 Chaque jours que l'Univers fait, depuis que ton PC est relié à l'Internet, tu recherches de nouvelles musiques, tu écoutes de nouveaux morceaux, mais, finalement, tu n'en retiens que très peu. Et puis, parfois, joue dans le casque, que tu portes serré sur les oreilles, la musique que, sub-consciemment, tu attendais. Alors, tu as l'impression qu'un de ces morceaux déposés sur le Web a été composé pour toi et qu'il vient à ton écoute juste à temps, au moment où tu en as le plus besoin, avec des paroles écrites spécialement pour toi. C'est ce qui s'est produit cet après-midi, lorsque tu as découvert White Gloves. Tu en es ravi, mais tout de même un peu triste de n'avoir pas su dans ta vie écrire, au moins une fois, un si beau texte, si poétique. Ou alors, c'est que tu ne t'en souviens pas. Pourtant, White Gloves, si limpide, semble facile à composer. Comment n'as-tu pas pu faire aussi bien ? Tu vas poser la question à Saki qui, lui-seul, doit avoir la réponse.

White Gloves

She was a queen. / She had a house. / She was a fighter. / She was a queen. / Had a good dude. / Bought me a rabbit. / She was a queen. / Wearing white gloves. / But she kept 'em clean. / Classy Lady. / But she wasn't quiet. / She was a queen. / One day she was gone. / She died in a fight. / 'Cause she was a fighter. / She was a queen. / She was a queen.
Khruangbin, The Universe Smiles Upon You   

14.1.18

Le cynisme des maîtres

La conscience des maîtres a son insolence spécifique : le cynisme des maîtres au sens moderne du terme, à la différence de l’offensive kunique. Le kunisme antique, le kunisme primaire et agressif, était une antithèse plébéienne à l’idéalisme, le cynisme moderne est cependant l’antithèse des maîtres à leur propre idéalisme comme idéologie et comme mascarade. Le maître cynique ôte le masque, sourit à son faible adversaire et l’opprime. C’est la vie. Noblesse oblige. Il faut de l’ordre.
Peter Sloterdijk   

11.1.18

Vermine

Ma poésie ne consistera qu'à attaquer, par tous les moyens, l'homme, cette bête fauve, et le Créateur, qui n'aurait pas dû engendrer une pareille vermine.
Isidore-Lucien Ducasse, dit comte de Lautréamont  

10.1.18

Remède

 Aussitôt que vous vous sentirez capable de mettre à profit les secours de mon art, commencez par fuir l’oisiveté ; l'oisiveté fait naître l'amour, et le nourrit une fois qu'il est né ; elle est à la fois la cause et l'aliment de ce mal si doux ; sans l'oisiveté, l'arc de Cupidon se brise, son flambeau s'éteint et n'est plus digne que de mépris. Autant le platane aime les pampres de Bacchus, le peuplier la fraîcheur des ruisseaux, et le roseau marécageux une terre limoneuse, autant Vénus aime l'oisiveté. Voulez-vous voir la fin de votre amour, occupez-vous ; l'amour fuit le travail ; travaillez donc, et vous serez sauvé.
Ovide, Les Remèdes à l'Amour   

8.1.18

↓+ K ↓↘︎→ + P


6.1.18

Écumes

 "Ecumes turned 6 today! We hope it was a great year, and we look forward to sharing many more!" Tumblr t'as rappelé, en début de soirée, que tu as complètement négligé Écumes, au cours de l'année dernière. Ce qui est d'ailleurs le cas pour les 14 autres micro-blogs ouverts sur cette plate-forme, à l'exception de Invisible & Ineffable sur lequel tu as publié jusqu'à la fin de l'automne 2017. Cette réflexion te donne un prétexte pour rédiger le premier billet de l'an 2018 sur Blogger. 2018... Tu n'oses même pas y penser, tellement l'horizon qui se profile sous ton regard incertain te semble mal crayonné, totalement raturé.